Un apprenti en or au Pôle Formation UIMM

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Débitage, roulage, pliage, ceintrage, encochage, accostage… À chaque métier son langage. Celui du chaudronnier ne s’encombre pas d’un jargon obscur. Simple et concret, il s’apprend rapidement. En revanche, la maîtrise du geste demande des années de pratique.

Pour réussir à dominer la matière, pour jouer avec les propriétés du métal et anticiper ses réactions à l’étirement, l’apprentissage reste indispensable, même à l’heure des lasers de haute précision et des outils à commandes numériques. Mais l’habileté ne suffit pas à faire un bon chaudronnier. Ce métier d’excellence exige aussi des compétences intellectuelles pour visualiser des pièces dans l’espace ou développer des volumes d’après un plan. Aéronautique, métallurgie, automobile, pharmaceutique, agroalimentaire, nucléaire… Toutes les industries recherchent des chaudronniers qualifiés. Face aux difficultés de recrutement, certaines n’hésitent plus à chasser leurs futurs salariés avant même qu’ils n’obtiennent leur diplôme, ce qui ouvre de belles perspectives de carrière aux apprentis.

Lenny Bource, 17 ans, a choisi sans hésitation de marcher dans les pas de son grand-père, lui-même chaudronnier. Le jeune homme est passé par la seconde structurante du Pôle formation UIMM* (une classe tremplin), le temps de trouver une entreprise pour son apprentissage. Une fois salarié de Sodijantes industrie à Falaise, il a préparé en alternance un bac pro TCI*.

« À partir d’une simple feuille de métal et avec quelques rudiments de trigonométrie, on est capable de tout faire, détaille l’apprenti. Mais il faut aussi connaître les propriétés physiques et la structure moléculaire des aciers spéciaux. Certains durcissent quand on les chauffe. »

La motivation de Lenny n’a pas échappé à ses formateurs qui lui ont proposé un challenge : se présenter au concours des WorldSkills France. Médaillé d’or des sélections régionales en janvier 2023, il a ensuite porté les couleurs de la Normandie à Lyon, lors du concours national en septembre. Pendant des semaines, tout en préparant les épreuves du bac, il a répété ses gammes avec Stéphane Barey, l’un de ses formateurs. « Lenny, c’est la force tranquille, rien ne le met en doute. Il est méthodique pour faire les débits et assembler dans le bon ordre, il maîtrise les machines, sait anticiper les déformations du métal… »

La finale nationale des WorldSkills, qui a réuni 800 jeunes de toute la France, a permis au jury d’apprécier le geste technique, la pièce réalisée, tout autant que la posture de l’apprenti.  Alors qu’il est encore en formation, Lenny a déjà dû faire preuve de professionnalisme. « Cette aventure illustre bien la relation fondamentale entre l’apprenti, l’entreprise et le centre de formation. Relation qui est l’essence même de l’apprentissage », souligne Stéphane Barey.  

Le Pôle formation UIMM Grand Ouest Normandie a été fondé il y a plus de 30 ans sur les bases de l’ancienne école de production métallurgique de la SMN*. D’abord concentré sur les métiers de la production industrielle, ce qui est toujours le cas aujourd’hui, il a élargi le choix de ses formations pour répondre aux besoins des entreprises locales. « Certaines industries peuvent être freinées dans leur développement si elles ne parviennent pas à recruter des salariés formés, notamment quand la pyramide des âges impose de renouveler les effectifs, observe Marc Mullier, responsable commercial et développement du Pôle Formation UIMM Grand Ouest Normandie. Nos métiers sont assez mal connus du grand public. Si l’on n’a pas un proche qui travaille déjà dans l’industrie, on ne pense pas spontanément à cette filière, particulièrement dans le bassin caennais dominé par les métiers du tertiaire. »  

Travailler dans l’industrie, c’est choisir un métier qui a du sens, notamment pour des jeunes qui ont connu une erreur d’orientation. Marc Mullier se souvient de cette étudiante de BTS qui avait démarré des études de médecine pour reproduire le schéma familial et qui a fini majore académique.

Les quatre sites du Pôle formation UIMM Grand Ouest Normandie proposent un cursus commun mais ils développent des spécialités locales en fonction de leur bassin d’emploi. Ainsi le Pôle de Vire intègre un BTS industrie « 4.0 » dédié à la maintenance des systèmes de production dans les environnements connectés. « Robots, automates, intelligence artificielle, réalité augmentée ne sont pas des gadgets. Ces technologies sont totalement intégrées dans les systèmes de production, et cela impacte nos formations. Aujourd’hui, les apprentis doivent être très adaptables et capables de travailler avec ces technologies mais aussi de manière conventionnelle. »

Pour sa part, Lenny a décidé de prolonger sa formation par un BTS CRCI*. « Je ne me vois pas dans un bureau d’études, plutôt dans un atelier car j’ai encore besoin de toucher la matière. »

^* UIMM (Union des industries et métiers de la métallurgie).

^* Technicien en chaudronnerie industrielle.

^*Société métallurgique de Normandie.

^*Conception et réalisation en chaudronnerie industrielle.